Discours de marque, attention au marketing poubelle

Le discours de marque fait partie de ces choses encore un peu difficiles à comprendre. Pourtant, il est la clé de voûte pour mieux vous connecter à vos publics.

Malheureusement, certains ne l’ont pas défini. Et quand bien même le discours de marque est défini, il n’est pas utilisé à son maximum. Pour en témoigner, ces derniers temps, j’assiste au délitement de plus en plus profond de la profession de concepteur rédacteur au Cameroun.

J’ai envie de parler de descente aux enfers, mais c’est plus une descente dans les caniveaux. À ce titre, j’ai lancé le hashtag #tropdefaiblesse sur Facebook.

Voici le post (verbatim) qui m’a décidé à faire cet article 👇🏾 :

Comment le langage de la pub a changé au Cameroun en 2015 !!

Il faut savoir une chose, chaque marque qui se respecte a une « charte » qui n’est pas que graphique, mais aussi rhétorique, sur comment elle parle aux gens et en fonction de ses produits et ses cibles. Surtout en ce qui concerne ce qu’on appelle les « marques groupes » comme Guinness comme Orange.

Avant 2015, Orange etant une marque française a sa manière de parler aux français et aux francophones dans les pays africains où ils sont implantés; la marque parlait donc « le bon français parfumé » comme dit @Sadrak. C’est un positionnement, un choix, qui devient une norme, une charte à suivre.

Vers 2015, une nouvelle ère s’annonce, AGP (Publicis Group) gagne la marque carrée. Ensemble Ils proposent une nouvelle approche, axée beaucoup plus jeunes, avec la montée en puissance de la data.

Sous l’égide de Eric Mahieu, Nadège Kouma et Bobby Shahmahn de Red Zone, l’agence se lance dans une nouvelle approche du « parler camerounais » du « terre-terre » ce qui est bienvenue chez la marque avec des acteurs clés et avant-gardistes comme Blaise Etoa Bobby Raptus Edwin Eselem et bien d’autres.

Ce spot vidéo produit en 2015 en le premier pas vers cette longue et passionnante marche. A un moment où personne n’osait ni le savait le faire.

Après 2015

C’est dans cette démarche que des buzz inédits dans le domaine on pub se créer avec « Dans la sauce » en 2016 avec les Lions, les sms comme « bae » « tu veux briss » et beaucoup d’autres expressions et concepts de ce genre ayant marqué l’esprit des gens, comme jamais avant.

Ces acteurs que je viens de citer sans leurs avis ne se placeront jamais sur Facebook pour parler de ce genre de choses, car ce métier est si noble qu’on ne peut pas être en train de danser et applaudir ses pas de danses en même temps.

Ceux qui ont découvert le Marketing (abus de langage à la camer) ou la Publicité avec le Foup Fap ne le sauront jamais de quoi on parle. Normal, nous sommes dans un pays où ceux qui savent se taisent, et les ignorants qui se présentent comme référence parlent, parlent et parlent.

Felix Mbetbo

Et ma réponse 👇🏾 :

Le début de la descente aux enfers, pour se retrouver dans le caniveau.
Il y avait une autre manière, plus élégante d’y arriver, sans égratigner la patine de la marque Orange dont j’ai parlé dans mon livre bit.ly/LOGOBOOK.
Cette méconnaissance du branding par les gens du marketing et de la publicité est une véritable plaie. J’assume mes propos.

Les faits sur le « parler kwat »

Ce que je qualifie de « parler kwat » [kwat ou kwata (cm-fr-en – camfranglais ou camfranglish) de quarter (en), quartier (fr)] ne date malheureusement pas de cette époque.

Pour comprendre la connotation péjorative du terme « kwat », j’invite le lecteur à visionner cette vidéo du titre « Don 4 Kwat » de Jovi Le Monstre :

https://youtu.be/44ad7xlThB8?si=KlCHHaya5nekPTZJ

Ce que je qualifie du début de la fin, c’est la fameuse campagne « Je Wanda » par MTN Cameroon en 2006, soit près de 10 ans avant les évènements évoqués par M. Mbetbo.

YouTube video

J’estime humblement que ceux qui ont repris le lead au marketing à MTN Cameroon après M. Tsala, n’ont pas compris l’esprit du concept (ou n’ont pas voulu aller dans la même direction ?) ; ni même l’opportunité qui se cachait derrière : créer une sous-marque pour leur segment de clientèle « jeunes »

J’y reviendrai plus loin dans le texte.

Malheureusement, cette mauvaise interprétation de la stratégie d’endossement de la musique urbaine camerounaise par MTN Cameroon a conduit à de nombreuses dérives.

Notamment, le fait que l’expression « je wanda » (« je suis dépassé » en camfranglais) fasse aujourd’hui partie intégrante du discours de marque de MTN Cameroon.

Source : https://mtn.cm/offers/mtn-wanda/

Je reste convaincu qu’il y avait moyen de faire mieux. Parce qu’à mon plus grand désarroi, c’est une pratique qui s’est répandue à tous les annonceurs :

Tirer dans le langage familier, le camfranglais, les expressions tendance ou les buzz pour forger son discours publicitaire.

Et ce n’est pas toujours approprié en termes de brand building. Sans compter le fait que cela dénote d’une absence réelle de stratégie de communication, et même de stratégie marketing.

Exemples de marketing poubelle

Voici des « morceaux choisis » pour illustrer la tendance qui dure depuis bientôt 20 ans au Cameroun :

Pour le cas particulier des chansons populaires, certains annonceurs n’ont pas hésité à surfer sur le buzz.

Ce qui a donné lieu à la rédaction de cet article, du point de vue de la propriété intellectuelle.

Je disais déjà en 2017 :

On se rappelle de ces campagnes, qui surfent sur le succès d’œuvres populaires, se faisant du buzz au détriment des auteurs compositeurs. Preuve que nos agences de création publicitaire manquent de créativité et surtout, de subtilité.

Il est donc évident que mon combat n’est pas contre Bimstr Agency, mais contre toute l’industrie de la communication et de la publicité au Cameroun, qui a passé plus de 20 ans à installer de mauvaises pratiques.

L’absence de conscience de marque

Dans cet article, j’avais affirmé suite à des observations tout à fait empiriques des différentes prises de paroles, et même des actions terrain des « marques » Camerounaises :

Dans notre environnement (le Cameroun), je pense, d’après mes observations, que les entreprises locales de toutes tailles, et même la majorité des multinationales sur place, n’ont pas bâti ce que je qualifie de conscience de marque.

Elles souffrent d’absence de conscience de marque.

En d’autres termes, beaucoup d’entreprises ne se considèrent pas comme des marques, et ne pensent pas avoir de marques.

Beaucoup de brand managers parlent de « marque » sans réellement savoir de quoi il est question.

Le branding est encore un concept abstrait pour beaucoup de gens du marketing.

Conséquence : les marques sont plus accidentelles qu’intentionnelles. Elles sont ainsi à la merci des consommateurs et de la concurrence.

Qui parle de conscience de marque parle de branding et surtout stratégie de marque et par conclusion d’identité de marque.

Je définis le branding comme :

Le processus intentionnel de création d’une marque.
Il est soutenu par le brand marketing, qui est l’ensemble des actions mises en place pour installer la marque dans l’esprit et le cœur des consommateurs.

Quant à la stratégie de marque, elle est basée sur la stratégie d’entreprise, et d’après Marty Neumeier :

Une stratégie de marque est un plan de développement systématique de la marque en alignement avec une stratégie d’entreprise.

Jason Vana de SHFT Agency de son côté pense que :

Une stratégie de marque est le volet orienté client de votre stratégie d’entreprise.
Elle fournit une orientation pour chaque partie de votre entreprise qui a un impact sur vos clients. Il s’agit d’une stratégie d’entreprise qui vous permettra d’attirer, de convertir, de ravir et de fidéliser vos clients idéaux.

Et c’est quoi l’identité de marque ?

L’identité de marque est tangible et s’adresse aux sens. Vous pouvez la voir, la toucher, la tenir, l’entendre, la voir bouger. L’identité de marque alimente la reconnaissance, amplifie la différenciation, et rend accessible l’idée d’ensemble et la signification. L’identité de marque prend des éléments disparates et les unifie en des systèmes entiers.
– Alina Wheeler, Designing Brand Identity

Le prisme de Kapferer appliqué à la marque Perrier – Agence Demeter et Kotler

Retenons simplement que l’identité de marque est constituée :

  • des valeurs fondamentales de la marque,
  • de l’identité visuelle de la marque
  • et du discours (voix et ton de la voix) de marque.

C’est ce dernier point qui nous intéresse.

Mais avant de passer au ton, je voudrais faire le point sur le concept de voix de marque.

Une voix de marque bien définie, soutenue par des valeurs claires et cohérentes, est plus à même de créer un lien avec son client potentiel ou non : d’inspirer la confiance, de motiver l’engagement et de stimuler la loyauté des consommateurs. 

Ainsi, elle bâtit son identité narrative et contribue à se démarquer de la concurrence. C’est la base même du branding et du brand marketing, donc. Et un référent précieux pour mettre en place votre content marketing.

C’est quoi la voix de marque ?

La voix de la marque est la manière dont une entreprise communique avec son public et exprime sa personnalité à travers différents canaux de communication. 

La voix de marque permet d’exprimer l’identité narrative de l’entreprise. Cette voix inclut le ton, le style, le langage, et l’attitude utilisés dans toutes les interactions, qu’elles soient écrites, verbales ou visuelles. 

Une fois constituée, la voix de marque est intégrée dans la ligne éditoriale et la charte éditoriale.

Vous l’aurez compris, c’est ce que j’appelle aussi « discours de marque ».

La voix de la marque est cohérente et alignée avec ses valeurs fondamentales, sa mission, et ses traits de caractère, permettant ainsi de créer une connexion émotionnelle forte et durable avec ses clients.

Selon Paul Ricœur, l’identité narrative est un concept qui décrit comment les individus construisent leur identité à travers des récits (Ricœur, 1983). Ricœur distingue deux types d’identité :

  • Idem (mêmeté) : Cette forme d’identité se réfère à ce qui reste constant dans une personne malgré les changements au fil du temps.
  • Ipse (ipséité) : Cette forme d’identité concerne la capacité d’une personne à se percevoir comme la même entité à travers le temps, malgré les changements et les événements.

Ricœur propose que l’identité personnelle se construit en grande partie grâce à la narration. En racontant et en réinterprétant leurs expériences de vie, les individus créent une continuité et un sens à leur existence. 

Cette mise en forme narrative permet de donner un sens aux événements vécus et d’établir une cohérence entre le passé, le présent et le futur.

C’est quoi le ton de la voix ?

Dans sa forme la plus simple, le ton de la voix de votre marque est votre personnalité et la façon dont vous parlez aux autres. Il détermine la manière dont vous parlez à vos clients en ligne, sur les emballages, sur les réseaux sociaux – partout, vraiment.
Un ton de voix distinctif déployé de manière cohérente peut devenir aussi reconnaissable que vos couleurs ou vos images. Et il aidera à renforcer les autres aspects de votre marque.
Everything you need to know about… Tone of voice

Lors des ateliers CORE chez Lotin Corp. nous avons des exercices simples pour déterminer le champ lexical de la marque à partir de ses valeurs fondamentales. Même si le document que nous produisons sert de base pour la prise de parole, il est intéressant de noter qu’il n’est pas gravé dans le marbre.

Le discours de marque et le discours publicitaire

Une entreprise prendra la parole différemment s’il s’agit d’une opération de relation publique (information, gestion de crise…) ou d’une opération publicitaire.

Selon Servanne Barre et Anne-Marie Gayrard-Carrera dans La boîte à outil de la publicité :

Le langage publicitaire concentre en peu de temps et d’espace l’art de la persuasion. Il s’agit de dire, en quelques mots ou en quelques images, l’essence même de la marque.
Il énonce une promesse et cherche à susciter l’émotion, l’enthousiasme, le rire, l’empathie, etc.
Pour élaborer son argumentation, le discours publicitaire a, depuis plus d’un siècle, exploré nombre de figures de style, pour attirer l’attention, faire sourire ou rêver, étonner ou émouvoir !

Je retiens ici : « il s’agit de dire, en quelques mots ou en quelques images, l’essence même de la marque ».

Essence de marque ?

Et c’est quoi l’essence de marque ? Je vous invite à lire cette traduction de l’article de l’agence de branding Fabrik.

Bien qu’il existe de nombreuses caractéristiques différentes derrière toute organisation, une « essence de marque » fait référence à l’identité de base de votre entreprise. Ce concept intangible vous sépare des autres concurrents grâce à des facteurs d’affinité qui rendent votre entreprise plus fiable.
Certaines entreprises sont hautement professionnelles, techniquement avisées et avant-gardistes. D’autres se concentrent sur la fourniture d’une expérience chaleureuse et accueillante aux clients, avec des valeurs comme un service exceptionnel.

Pour mieux comprendre le logos, le pathos et l’ethos, bref la rhétorique publicitaire, je vous invite à lire cet article.

Le « parler kwat » et les annonceurs au Cameroun

Si l’on s’accorde qu’il y a une forte tendance des annonceurs Camerounais à « parler le kwat », on doit remarquer que cela « égratigne la patine des marques internationales » également.

Et c’est bien cette perte de vue du point de vue global qui m’interpelle.

Beaucoup d’auteurs s’accordent sur le fait qu’il faut adopter le langage de sa cible. Je suis d’accord dans la mesure où cela est réservé à des communications hyper ciblées, et non pas à des communications de masse. C’est mon humble point de vue. Et je le développerai dans la partie réservée au discours social media.

Discours de marque, hyper-ciblage et communication de masse

Je ne partage pas le point de vue de Antoine Leclerc de l’Agence Rinaldi quand il dit :

Lorsqu’on s’attarde aux données, on saisit vite pourquoi les publicitaires choisissent d’adapter leur langage aux divers auditoires auxquels ils s’adressent. Le choix des mots, semble-t-il, a un véritable impact sur les décisions des consommateurs.

Cela s’appuie sur des études de Tse et Soergel, des chercheurs de l’Université du Maryland. Nous pouvons dire que l’utilisation d’un vocabulaire familier dans une publicité donnée a tendance à encourager le public à se sentir plus près de la marque.

Parce que l’étude est basée sur l’utilisation de termes non techniques par des patients pour décrire leurs symptômes et des concepts médicaux. Et donc, la ramener au concept plus vaste de la publicité de masse, me semble un raccourci dangereux.

J’aime m’attarder sur les détails. Je retiens donc de cette citation : « les publicitaires choisissent d’adapter leur langage aux divers auditoires ».

On parle ici de ciblage avancé soit d’hyper-ciblage ou de micro ciblage (microtargeting). Un type de ciblage qui fonctionne parfaitement sur les canaux digitaux, notamment les groupes et les newsletters.

Je vous vois venir. 😅

Vous me direz : « Alors, pourquoi tu t’offusques sachant que ce n’est pas toi la cible ? »

Eh, bien. L’une des clés pour un branding réussi est la cohérence. Vous vous rappelez de la déclaration sur le discours publicitaire et l’essence de marque ? Voilà ! 😉

En outre, l’utilisation de l’argot dans la communication de masse est parfois un désavantage pour la marque, qui essaie un passage en force dans une conversation où on ne veut pas forcément d’elle.

Appropriation culturelle, appropriation sous-culturelle et publicité

Douglas Davis, dans son livre Creative Strategy and the Business of Design a raconté une anecdote intéressante sur son expérience avec une pub de Burger King :

Je n’oublierai jamais le jour où j’ai remarqué quelque chose de dérangeant dans la façon dont Burger King communiquait avec moi alors que je regardais des clips musicaux sur Black Entertainment Television. Visuellement, la publicité se résumait simplement aux lettres « BK4U » dans une typographie « urbaine » vieillie, comme si elles étaient taguées sur un mur de briques.

À l’écran, ce qui ressemblait à une voix d’homme afro-américain, scandait « B-K-4-U » plusieurs fois sur une vidéo montrant un Whopper appétissant grillé à la flamme en cours d’assemblage. Je suis sûr qu’il y avait un certain nombre d’adjectifs descriptifs spécifiques expliquant pourquoi le Whopper était le burger qui me convenait.

Vous êtes sûr que c’est à moi que vous parlez ?

La vérité est que cela aurait fonctionné, sauf pour une chose : je me souviens précisément m’être dit à 22 ans :

« Pourquoi ont-ils choisi de me parler de cette façon ? Je ne parle pas comme ça. »

La publicité était diffusée sur la bonne chaîne pour atteindre un jeune homme afro-américain, intéressé par la musique hip-hop et client régulier de Burger King. L’efficacité de la publicité est évidente, car je m’en souviens encore aujourd’hui (pour les mauvaises raisons).

Cependant, la communication fragmentée qui m’était adressée supposait une cible homogène, voire stéréotypée. J’étais familier avec le débit rap de la voix off et le style graphique « urbain », mais au final, j’ai ressenti la condescendance de la marque vis-à-vis de moi.

À l’époque, je n’avais aucune connaissance en publicité, en marketing, en démographie ou en psychographie. Je savais juste que sur d’autres chaînes de télévision, je « voyais » un concept et « entendais » Burger King parler en anglais simple en utilisant des phrases complètes.

Un problème racial mondial ?

Le sujet est remonté récemment avec Heinz, qui a été critiqué de ne pas être assez inclusif dans sa communication.

Kelly Mackenzie, promotrice de l’agence White Bear à Londres a parfaitement adressé le sujet dans un post récent sur LinkedIn :

Heinz se trompe encore une fois sur la sauce secrète. Leurs erreurs raciales soulèvent une question cruciale :

« Les marques vont-elles se mobiliser pour une meilleure représentation ou se retirer ? »

Heinz a récemment fait face à des critiques négatives pour deux de ses publicités accusées de promouvoir des stéréotypes raciaux.

Leur deuxième publicité inspirée du « Joker » sur le thème d’Halloween a été critiquée pour ses connotations de Blackface, tandis que l’autre, « Family Portraits », omettait le père noir d’une mariée, perpétuant ainsi un stéréotype.

Les deux publicités ont depuis été retirées, ce qui a suscité des discussions sur la question de savoir si cette controverse poussera les marques à améliorer leur représentation ou les poussera à se retirer par crainte des critiques publiques.

85,6 % des personnes interrogées dans une enquête récente ont estimé que les publicités étaient culturellement inappropriées et 71 % ont convenu que les marques devraient respecter les nuances culturelles pour s’engager plus efficacement.

Recommandations de Kelly

Pour éviter ces problèmes, Kelly recommande aux marques de se concentrer sur :

  • Aborder les nuances culturelles à la fois dans le texte et dans les visuels.
  • Impliquer des équipes diversifiées dans les processus décisionnels clés.
  • Utiliser la sémiotique pour assurer une communication interculturelle efficace.
  • Consulter auprès de diverses communautés lors du développement de campagnes.

Recommandations de Douglas

Une recommandation importante de Douglas  est celle-ci :

Votre design, votre packaging ou votre concept créatif doivent être si ciblés que les femmes qui répondent à un sondage pour la contraception sur votre site web ne se rendent pas compte que le site a été conçu par un homme. Le public haut de gamme de la Maserati pour lequel vous designez ne doit pas savoir que vous n’êtes pas riche.

Le travail pour n’importe quel groupe ethnique doit adopter le bon ton pour ne pas entraver la communication.

Mon expérience avec la publicité Burger King me rappelle qu’il faut chercher à comprendre les divers groupes auxquels je m’adresse au nom de mes clients. Et cela va au-delà de la simple couleur.

Les nuances psychographiques (ou attitudes et croyances des sous-segments au sein d’un groupe spécifique ou autour d’un certain produit) s’étendent à travers les cultures. Ce fait sert de base pour augmenter la représentation de toutes les voix dans la publicité et le design, et pas seulement celles qui sont sous-représentées.

Précision dans la stratégie = Précision dans l’exécution

Obtenir les bons détails et le bon ton facilite non seulement la communication avec chaque client potentiel, mais augmente également la probabilité d’être entendu. La clé est de comprendre d’abord que vous n’êtes pas la cible, puis de vous immerger complètement dans l’apprentissage de qui est la cible.

En fin de compte, toutes les voix sont nécessaires, à la fois devant et derrière le concept, le plan marketing ou la stratégie digitale. C’est ce qui définit le rôle d’un professionnel de la publicité ou du design et qui déterminera le succès dans un dialogue en constante évolution.

L’étudiant ou le professionnel qui réussira sera capable de créer un dialogue continu autour des produits et des services. Pour cultiver des relations individuelles, les marques auront besoin de professionnels formés pour intégrer un message pertinent dans divers canaux. »

Appropriation sous-culturelle

Au cas où vous vous demanderiez quel est le rapport avec le sujet de l’article, voici une vidéo de 8 minutes de la chaîne de télé PBS, par le Dr Erica Brozovsky : How Brands ruins Slang

Des marques qui disaient « Bae » dans les années 2010 aux publicités « Wassup » des années 90, les annonceurs essaient toujours de trouver des moyens de paraître cool. 

Mais lorsque les marques sur les réseaux sociaux utilisent un mot d’argot dans leur marketing, cela garantit pratiquement que c’est fini. Nous comprenons que les marques n’ont pas inventé ces mots et qu’elles ne font pas partie des groupes qui, selon nous, devraient les utiliser, mais pourquoi ? Qu’est-ce qui fait qu’un mot est un argot ?

Résumé de la vidéo How Brands ruins Slang

Voici ce que nous pouvons retenir des propos du Dr Erica Brozovsky :

[…] l’argot est un registre de communication qui remplit une fonction sociale.

C’est parce que chaque jour, nous utilisons l’argot pour solidifier nos identités individuelles en tant que jeune, femme ou habitant du Midwest, ainsi que notre appartenance à des groupes comme « TikTokers », « drag queens » ou « sneakerheads ».

Les marques qui tentent de marketer ces identités essaieront de reprendre cet argot pour donner l’impression qu’elles font partie d’un groupe social.

  • Mountain Dew veut ressembler à un gamer.
  • Glossier est une IT girl à la mode.

L’utilisation de l’argot nous donne un sentiment de communauté, d’appartenance et même de sécurité. Pensez à des mots d’argot comme « woke », que les Blacks ont commencé à utiliser pour communiquer leur conscience du racisme systémique.

[…] les sous-cultures des réseaux sociaux inventent régulièrement de nouveaux termes d’argot pour contourner la censure algorithmique et les filtres de contenu.

Ainsi, si un compte d’entreprise anonyme qui n’a pas besoin de ces mots pour nouer des relations ou communiquer en toute sécurité les utilise uniquement pour l’influence, cela semble totalement inauthentique.

Mais heureusement pour nous tous, le langage évolue constamment.

Au moment où les marques perturbent la fonction sociale des mots d’argot, les utilisateurs d’argot sont déjà en bonne voie pour en créer de nouveaux.

Les sous-marques au secours de la marque mère

Oui, une marque souhaiterait s’adresser aux jeunes pour ses nouvelles offres. Est-ce une raison pour s’aliéner leurs utilisateurs plus âgés et même B2B ?

La solution est très simple, en effet : une sous-marque ou un endossement de célébrité. 

Je ne suis pas très fan de l’approche « endossement de célébrité » au Cameroun, à cause de l’origine (parfois douteuse) de la notoriété de certaines personnes, en plus de beaucoup d’histoires de mœurs qui les entourent.

Ce qui nous conduit à l’architecture de marque qui devrait être maîtrisée par le propriétaire de la marque : laquelle adopter ?

Je recommande très souvent un endossement où la marque mère se mettrait en retrait pour laisser la marque fille s’exprimer et au besoin déployer son propre univers.

L’exemple de Virgin vient immédiatement à l’esprit. Quoique dans cet exemple précis, la marque mère est prégnante et fait plus que servir de caution. Et ce n’est pas vraiment ce que nous voulons, dans ce cas précis.

Sous-marques au Cameroun

Plus proche de nous au Cameroun dans les années 2000, et je sais que beaucoup de mes jeunes lecteurs ne s’en souviendront pas : Mobilis et sa marque Joker, qui s’adressaient aux clients de forfaits prépayés.

Ça avait très bien marché. Alors pourquoi nos annonceurs ne s’en inspirent-ils pas plus ?

discours de marque et sous-marque : Joker de Mobilis
Source : delcampe.net

J’ai plus haut évoqué la stratégie d’endossement de la musique urbaine par MTN Cameroon en 2006.

Cette stratégie est brillante parce que la marque laisse les personnes légitimes porter un discours avec leurs mots auprès de leurs communautés respectives.

La marque ne s’exprime pas directement, elle soutient une communauté, un mouvement, sans s’imposer dans la conversation.

Dommage que l’équipe qui a pris le relais soit passée à côté d’une telle opportunité.

Au contraire, beaucoup d’observateurs extérieurs, manquant de perspicacité, ont plutôt essayé de copier l’approche, sans pour autant chercher à la comprendre. Ce sont les créateurs originels du marketing poubelle.

#REDCity

J’ai eu une opportunité semblable lorsque j’étais consultant pour l’agence conseil en communication Tendances Scenic en juin 2016. Thibault Tsimi et moi avions proposé la création d’une sous-marque pour Nexttel, uniquement orientée vers les services « data » : #REDCity.

Que signifie ce logo ?

Ce logo n’est pas une marque déposée, mais l’expression des nouvelles perspectives de Nexttel.Avez-vous remarqué deux bulles parlantes ? La grande, c’est Nexttel qui dit à ses clients que : le bonheur est disponible ! La petite sur le point du « i », signifie que les clients parlent et que Nexttel écoute. Et la réponse, c’est #REDCity.

Pour des raisons de confidentialité, je ne peux en dire ou en montrer plus.

Malheureusement, cette idée n’a pas trouvé un écho favorable auprès du leadership de l’annonceur.

Et je crois que quelques mois plus tard, elle a été récupérée par Vodafone qui venait s’installer au Cameroun. Pas de chance ou absence de vision stratégique ?

RED by SFR

Un exemple parlant de sous-marque dans les télécoms à l’intention d’un segment de clientèle, est la marque RED by SFR créée en 2016 :

RED est la marque digitale de SFR. Cette marque a été pensée comme une marque native qui intègre tous les codes du digital et qui quitte les sentiers battus du marché des télécom.

Nous aurions pu continuer sous l’aile de SFR et proposer une nouvelle gamme… en rouge. Or l’idée est véritablement de se démarquer de la marque SFR et de proposer des offres adaptées aux digitals natives.

La création d’un univers graphique souple et décalé permet à RED de se faire l’ambassadrice d’une nouvelle génération de conso-acteurs, qui ne font décidément rien comme les autres !

Ce qui nous amène directement aux stratégies de discours de marque pour le social media.

Le discours de marque et le discours social media

Au lieu de chercher à bâtir une relation avec son audience à travers des campagnes de masse, les marques ont l’occasion d’être plus proches de leurs audiences respectives grâce aux médias sociaux (marketing tribal, marketing d’influence).

Melissa Duko de Business 2 Community soutient que ce qui fonctionne sur le web et dans les médias sociaux risque de ne pas nécessairement être aussi approprié dans d’autres médias.

C’est ce que je pense aussi. Mais cela vient déjà d’une confusion de rôles dans le marketing digital.

Beaucoup de managers chez l’annonceur (et même parfois en agence) demandent à un community manager (CM) de faire le travail d’un social media manager (SMM) ; et parfois même d’un digital marketing manager (DMM). 😤

Alors :

  • Le digital marketing manager est celui qui, en collaboration avec le responsable marketing de l’annonceur, met en place la stratégie de marketing digital (ensemble des canaux digitaux : site web, newsletter, SEO, social media…) de l’entreprise.
  • Le social media manager se charge de l’implémentation sur les médias sociaux.
  • Et le community manager comme son nom l’indique se charge d’engager la communauté sur les réseaux sociaux.

Le social media manager est en charge de prendre la parole au nom de la marque. C’est à dire qu’il utilise le compte (profil) de la marque. Contrairement au community manager qui a un profil de type personnel. Le community manager s’engage avec la communauté dans les commentaires, ou à partir des conversations qu’il engage à travers ses propres publications sur le compte de la marque.

Il est donc clair que le discours (lors de la prise de parole sur les réseaux sociaux) du social media manager sera différent de celui du community manager.

Les médias sociaux, une occasion pour les marques

Les medias sociaux sont l’occasion pour les marques d’être ubuesques, lorsqu’il s’agit de leur position d’émetteur unique. Elle devient multi-personnalités tout en restant cohérente.

Il sera donc naturel que la cible s’identifie à la marque lors des conversations avec un community manager qui parle son langage, plutôt qu’à un social media manager qui reste « corporate et neutre » lorsqu’il s’agit du langage. Ça a du sens ? 🙄

Ainsi, il devient impératif de mettre en place une charte éditoriale formelle pour toute l’équipe de communication.

Pour conclure

Cette communication poubelle (caniveau) à laquelle nous assistons aujourd’hui se voudrait un lointain cousin du newsjacking. Mais tout comme le shockvertising, il a ses codes et ses règles.

En outre, une agence ne peut bâtir toute une stratégie marketing sur une seule tactique : le buzz à tous les prix.

« L’essentiel, c’est qu’on en parle. »

Disent-ils de nos jours.

Actuellement, les pseudos professionnels du marketing et de la communication au Cameroun se retrouvent en train de descendre dans le caniveau, de fouiller au fond des poubelles, en quête du déchet le plus puant à la mode.

J’ai tellement à dire sur la question, mais je préfère m’arrêter là et vous proposer quelques lectures.

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