Publicité : approche globale ou locale ?

Il n’y aura jamais un marché mondial de la publicité standardisée. La publicité se nourrit de deux contradictions la tradition et la modernité.
– Dr. Dominique Wolton

Une assertion qui oppose, depuis des années déjà, chercheurs et praticiens de la discipline.

Une thématique chère à Théodore Levitt qui dans « Gobalization of the market » paru en 1983, avec son corollaire la globalisation de la publicité, prenait déjà position pour une approche plus globale des marchés.

L’objectif avoué dans sa démarche était double : s’inscrire dans une disruption comme alternative efficace à une approche contextuelle des marchés mais aussi, trouver des sources d’économie face à la dérive des budgets de marketing et de communication dans les entreprises.

Idées ou égos ?

Sur le plan théorique, le débat qui promettait un combat intellectuel s’est plutôt confiné en un débat de posture. Très vite Levitt a dû abdiquer face à la frénésie de ses adversaires, principalement européens ; l’approche étant jugée trop radicale et pas en phase avec les principes fondamentaux du marketing. Mais sur le fond, c’est un débat passionnant.

L’objectif principal du marketing étant de rechercher les attentes et besoins réels et latents des consommateurs en vue de leur satisfaction.

D’un point de vue pratique, cela suggère la prise en compte des spécificités locales qui touchent à la symbolique des formes et des couleurs. Il s’agit là, d’une approche cohérente dès lors que l’on s’adresse à une population qui par nature est hétérogène, c’est à dire, constituée de sous-groupes homogènes et donc très différents des uns des autres. La tradition prend dès lors toute son importance dans le processus de création publicitaire qu’il convient d’agrémenter d’une dose de modernité, dans le sens de sa contemporanéité.

De toute évidence, l’approche est classique.

Pour autant, est-ce là, la seule possibilité d’une proposition pour une création publicitaire ?

Levitt a donné des exemples de publicités globalisées et réussies. Et de nombreux cas sont à notre portée. La publicité d’un déodorant pour homme dans les années 90 qui fait apparaître des visages différents qui se succèdent, passant d’une race à une autre. Elle a été implémentée à l’identique dans le monde entier, avec succès.

Une autre publicité, au milieu des années 80, montrant un enfant sur une balançoire qui, lorsqu’il se trouvait en haut souriait et lorsqu’il était plus bas, pleurait. Cette publicité a fait le tour du monde et est d’ailleurs classée parmi les meilleures jamais réalisées. Il apparaît donc que sortir de cette dualité (tradition/modernité) peut se faire.

Mais cela demande de définir une nouvelle approche qui se départirait de la connotation traditionnelle mais qui s’articulerait autour d’une nouvelle dualité (émotion/modernité) par exemple. Même jusque-là, la tâche serait loin d’être simple. Il faut encore faire attention aux interdits culturels, qui, plutôt que de transmettre l’émotion recherchée, pourraient déboucher sur des perceptions erronées, parfois mitigées ou simplement de mépris. En réalité, la globalisation est contraignante.

Elle exige, une bonne connaissance en management interculturel, dont la formation fait défaut aujourd’hui aux publicitaires et hommes du marketing. Pourtant, ce n’est qu’ainsi que l’on parvient à une forme de compromis qui rassemble, en usant d’éléments qui font consensus. C’est probablement cette difficulté de recherche et de connaissance de l’autre qui rend ce concept difficile à appréhender.

Contextualisation, adaptation ou domestication ?

Mais à bien y réfléchir, n’est-ce pas déjà ce qui est fait à des niveaux plus réduits ? Au niveau domestique ? L’exemple du marché camerounais, riche d’une multitude de cultures et de traditions, montre bien les limites de la contextualisation poussée à l’extrême. Les publicités surfent très bien sur les traditions. On en arrive à établir une globalisation locale qui garantirait les conditions d’une acceptation par les différents peuples, pourtant hétérogènes.

Faut il faire un rapprochement entre les prétentions d’une industrie et sa capacité à se réinventer ? Certainement que OUI. La production européenne, à quelques exceptions près, étant limitée à quelques marchés, surtout domestiques et régionaux, n’exigent pas de transcender des traditions déjà inscrites dans une forme de modernité partagée dans cet espace commun.

Mais pour les américains, les japonais et les chinois, l’optimisation des ressources ouvre la porte à une réflexion sur le sujet. Pour être toujours plus compétitif sur le marché mondial, il faut se réinventer et engager une réflexion qui se prête à des champs inconnus. Arriver à une forme de standardisation de la publicité est aussi une forme d’optimisation par la réduction des coûts de publicité.

Et c’est bien là, toute l’originalité de la proposition de Levitt, quand il pense un marketing global dont l’ingrédient résulterait de sa capacité à contourner les contingences locales, comme cela se fait déjà dans les marchés domestiques.

Ceux-là qui y parviendront, gagneront le pari de la mondialisation, avec en prime les économies énormes.Cette approche impose aux Task forces une audace peu commune dont les avantages sont multiples.

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